La musique et la danse réchauffent les cœurs et adoucissent la vie. C’est ce que souhaite partager le fonds de dotation Philanthropic ArsNova, mécène de l’Opéra de Paris. Il invite ainsi des bénéficiaires d’associations, et notamment les résidentes du Palais de la Femme de l’Armée du Salut, à des représentations de ballets et d’opéras et des visites, qui sont pour eux des moments de beauté et de répit dans un quotidien nuageux.
« Un ravissement des sens ! Une grâce divine qui vous enveloppe. Une ode à la vie. Une danse philosophique. Un lancer de balles vertes qui faisaient jardin, paradis, joie de vivre, légèreté de l’âme… » À propos du ballet Play d’Alexander Ekman qu’elle a vu fin 2024 à l’Opéra Garnier, Béa reste intarissable. L’émotion transpire encore. « C’est une sensation qui dure dans le temps. À chaque fois que j’y pense, j’ai un moment de lévitation. » Chacun de ses mots enthousiastes sont des fleurs envoyées au chorégraphe, aux danseurs, à la chanteuse, mais aussi à ceux qui lui ont permis de vivre cette expérience nouvelle. Laurence a connu au même endroit cet état d’exaltation émue en mars dernier devant une répétition publique du ballet Sharon Eyal-Mats Ek. « Le spectacle ne m’a pas plu… il m’a enchantée ! C’était magique ! Je suis sensible à l’art, à la musique classique, à la peinture mais là j’ai découvert que je pouvais aimer aussi la danse contemporaine. » Au lendemain de cette soirée, elle est encore dans sa bulle. « C’est difficile d’en sortir. Le spectacle était d’une telle qualité ! Et en plus dans ce très beau monument de Paris. » Laurence comme Béa vivent au Palais de la Femme à Paris où elles ont trouvé refuge. C’est en pensant à elles et à leurs sœurs de galère – qu’elles soient en peine de trouver un emploi ou un logement, fragilisées par des accidents de la vie ou victimes de violences – que le fonds de dotation Philanthropic ArsNova s’est rapproché de ce centre d’hébergement.
Un mécénat qui évolue
Dans son portefeuille d’activités autour des arts vivants, Philanthropic ArsNova a repris à son compte le mécénat avec l’Opéra de Paris que la Maison Taittinger avait initié il y a une dizaine d’années. D’un commun accord, les modalités du mécénat ont évolué cette saison. « Pour être en cohérence avec notre vocation, nous avons demandé à ce qu’il soit redirigé vers les programmes d’ouverture culturelle à l’Opéra Garnier comme à l’Opéra Bastille, explique Caroline de Chantérac, directrice du développement du fonds. Dans ce cadre, nous avons accès, en contrepartie, à des places pour des ballets et des opéras, des répétitions, des spectacles jeune public, des avant-premières… Ces places, nous les proposons à nos associations partenaires, selon la typologie de leurs publics. » Principaux destinataires pour le moment : la Fondation de l’Armée du Salut, les Apprentis d’Auteuil et le Groupe SOS. « Nous ne cherchons pas à faire de la quantité mais de la qualité, insiste-t-elle. Nous voulons que ce moment qu’ils peuvent vivre à l’Opéra leur apporte un petit plus, de l’émerveillement, de la resociabilisation, de la découverte. » L’Opéra de Paris approuve la démarche qui recoupe ses propres objectifs : « C’est une grande maison qui essaye de casser les codes, de déconstruire les clichés et d’ouvrir ses portes pour toucher de nouveaux publics. On leur propose des choses qui n’ont pas été faites jusqu’à présent. On réfléchit et on avance ensemble. »
« Une parenthèse enchantée »
150 places ont déjà été redistribuées depuis septembre 2024, dont une partie a été offerte au Palais de la Femme. Émanation de l’Armée du Salut, ce lieu accueille en majorité des femmes isolées, vulnérables, à qui de telles invitations peuvent mettre du baume au cœur. « La soirée à l’Opéra m’a fait un bien fou ! confirme Laurence. C’était une parenthèse enchantée dans un monde de brutes. On n’est pas les mêmes quand on a vu des choses aussi belles. Les difficultés de la vie, vous les oubliez. » Béa n’en pense pas moins : « Quand les animatrices du Palais m’ont proposé d’aller voir ‘Play’, j’étais cloîtrée, fatiguée, en mode blues de l’âme. Elles ont insisté et j’ai bien fait de me laisser faire. On vit des choses bouleversantes mais des moments suspendus comme celui-là viennent en compensation. À quelque chose malheur est bon… » Avec le Palais de la Femme, Philanthropic ArsNova souhaite aller plus loin dans le partenariat. Caroline de Chantérac : « Nous nous sommes rendu compte que, pour certaines résidentes, aller à l’Opéra n’est pas simple, peut faire peur. Elles ont des vies compliquées, des moments où elles vont moins bien, sont moins en capacité de sortir. Avant de les faire venir à l’Opéra, nous allons essayer de faire venir l’Opéra à elles. C’est-à-dire leur proposer un parcours par étapes, avec présentation du lieu, introduction à l’art lyrique et à la danse, écoute en amont d’œuvres connues, rencontres avec des artistes ou des artisans d’art travaillant à l’Opéra, visite des bâtiments... Nous sommes très heureux que ce programme nommé ‘Opér’Arts’ soit marrainé par la danseuse étoile Valentine Colasante avec qui nous partageons les mêmes valeurs, et qui va apporter encore un peu plus de magie à ce parcours. » L’expérience ensuite sur place n’en sera que plus riche.