Le Taittinger, prix international de cuisine d’auteur a célébré ses 50 ans en 2017. Cinquante années et autant de parcours et d’aventures humaines autour de cette distinction gastronomique. Pour l’occasion, l’ouvrage « Le Taittinger : le prix des chefs » a retracé l’histoire de ce concours entre tradition et inventivité, dont les portraits de quinze chefs lauréats ont été confiés aux soins du photographe Gérard Rondeau. Une collaboration sensible qui mêle les arts culinaires et ceux de l’image.
C’est autour d’une table qu’il s’exprime, et à son siège qu’il prit vie. Le Taittinger, prix international de cuisine d’auteur, autrefois nommé le Prix Culinaire International Pierre Taittinger (en hommage au fondateur de la maison de Champagne, et fin gourmet), est évoqué un soir de 1966 durant les vendanges. À l’époque, Claude Taittinger (fils de Pierre Taittinger) et Georges Prade, commandeur de l’ordre des Coteaux de Champagne, échangent sur leurs souvenirs et amours réciproques de la gastronomie française. Vient alors l’idée de lui rendre hommage en lui dédiant un concours. Il va depuis lors, incarner l’esprit d’une maîtrise autant que d’une créativité au service des papilles.
Écrire l’histoire
Aujourd’hui devenue un symbole d’excellence dans le milieu, cette distinction se décline en plusieurs étapes. Une nationale sur dossier, suivie d’une finale internationale au sein de l’école Ferrandi partenaire, dont les élèves sont les commis des candidats. Rare récompense culinaire mondialisée, elle est présente dans huit pays. Présidé par Emmanuel Renaut, chef trois étoiles du Flocons de Sel (Megève), le jury se compose de professionnels reconnus, figures tutélaires aux yeux des postulants. Nombre de grands noms de la gastronomie sont passés par les épreuves de ce prix, à commencer par Michel Comby (1967), puis Joël Robuchon (1970), mais aussi Michel Roth (1985) ou Régis Marcon (1989), promettant un avenir auréolé de succès à Charles Coulombeau (2020). L’idée d’un ouvrage hommage, loin des formats catalogue, était alors de narrer avec justesse tous ces parcours de vie et de retranscrire l’âme du concours.
« On voulait qu’à travers ce livre on puisse comprendre l’aventure du Taittinger. Cet événement ne se résume pas juste à des hommes et des recettes, mais à une aventure humaine. C’était important pour nous que les gens puissent ressentir l’ambiance du prix » nous explique Vitalie Taittinger, présidente de la Maison. Pour Le Taittinger : le prix des chefs, son équipe et elle-même ont alors convoqué 15 lauréats en leur demandant de refaire leurs recettes, recueillant ensuite les commentaires et témoignages de chacun, ainsi que ceux du jury, des commis et des intervenants sur le concours. Nadège Forestier a mis en mots cette histoire, Jean-Blaise Hall s’est attelé à immortaliser leurs plats en image et Gérard Rondeau a su capter la personnalité des chefs.
Gérard Rondeau et seulement lui
Photographe natif de la Champagne, nous lui connaissons son amour pour la région, avec notamment sa série le long de la Marne ou son hommage à la cathédrale de Reims. Il s’est par ailleurs illustré tout au long de sa carrière pour la qualité de ses portraits.
Pour ce projet en adéquation avec son travail personnel, Gérard Rondeau s’est immiscé dans les coulisses du concours, comme il l’avait fait dans les coulisses des musées pendant vingt ans. « On voulait un moment de grâce, une vérité. Des portraits photo à la manière d’un peintre » ajoute Vitalie Taittinger. Bien que les images de l’artiste soient intégrées dans son imaginaire depuis petite fille, c’est en se rencontrant que l’attention portée et le choix de Gérard Rondeau se sont affirmés pour ce livre anniversaire.
« Gérard a une façon très particulière de photographier. Il est très discret, il travaille avec un petit appareil, un Leica, qu’il cache toujours sous sa veste. Il ne fait pas poser les gens. Il recherche toujours un moment fugace qu’il va trouver », nous précise Jean-Pierre Redont, secrétaire général du Taittinger. En noir et blanc, Gérard Rondeau décline donc son univers pour le concours, réalisant des portraits comme s’il s’agissait de l’une de ses propres séries. Insufflant toute sa sensibilité et son savoir-faire au côté des chefs dont il parvient à briser la coquille si robuste qui fait leur réputation, et nous dévoilant ainsi l’individualité profonde de chacun. En couverture de l’ouvrage, un buste sous un tablier blanc arborant une médaille. Une décoration à l’effigie de Pierre Taittinger, faisant entrevoir toute l’étendue de cette histoire familiale et collective, où la transmission se fait entre les générations, mettant toujours l’humain au premier plan.