Stratégie marketing ? Développement de notoriété ? Le placement de produits fait aujourd’hui florès auprès des marques à qui cette forme de communication moderne permet de toucher un large public national et international. Pour Taittinger, cet échange de bons procédés au service du cinéma procède aussi d’une longue tradition de soutien aux arts.

Paris la nuit. Emily et Mindy débouchent une bouteille de champagne devant la tour Eiffel illuminée et partagent aussitôt leurs selfies festifs sur les réseaux. Combien de fois cette séquence d’Emily in Paris a-t-elle été vue ? Des dizaines de millions. C’est-à-dire que des dizaines de millions d’abonnés de Netflix dans le monde ont eu sous les yeux l’étiquette de ce produit qui symbolise l’art de vivre à la française et qu’on retrouve dans la série à d’autres moments glamour et high-life. Conseillée par l’agence Marques & Films qui la représente dans la sphère cinéma-télé, la maison Taittinger a mis dans le mille en choisissant d’apparaître dans cette production. Non seulement parce que celle-ci a fait un carton international mais aussi parce l’image de Taittinger et l’univers de la série ont su se rendre compatibles. Une heureuse convergence qui ne doit rien au hasard et tout au savoir-faire d’experts en placement de produits, métier que Jessica Chamot pratique passionnément depuis 20 ans. « On a tendance à en avoir une vision réductrice : des Nike aux pieds du personnage, une bouteille de Coca sur une table. Alors qu’on n’est plus du tout dans une place figurative. C’est une insertion organique dans une histoire. »

Nourrir le film de véracité

Les scénarios circulent en amont des tournages entre Marques & Films et les producteurs ou les équipes techniques. « Les uns peuvent vouloir intégrer le placement de produit dans leur plan de financement, les autres vouloir nourrir le film de véracité. » C’est là qu’intervient l’acuité professionnelle de Jessica Chamot : « On fait un dépouillement du scénario, on examine chaque scène en détail et on catégorise celles qui prennent de l’importance ou pourraient en prendre. À partir de là, on soumet au producteur entre 12 et 15 placements de produits qui nous semblent vraiment intéressants et crédibles. » Après entente, l’agence prend contact avec des marques des secteurs qui ont été repérés et leur propose ces opportunités. « Notre rôle est d’être entre les enjeux marketing des marques et la compréhension de l’univers artistique d’un réalisateur. Quand vous présentez la possibilité d’un placement à une marque, il y a derrière un vrai choix stratégique. Est-ce qu’elle veut s’adosser aux valeurs de cette histoire ? Qu’est-ce que son produit va apporter ? Va-t-il transcender l’histoire, transformer une action, corroborer une intention ? Quand je vais chercher une marque, c’est que je suis convaincue qu’il y a adéquation. »

Taittinger dans En attendant Bojangles (2021)

Le réalisateur est l’arbitre

Le placement de produit est une façon – parfois subliminale – de communiquer, qui est en plein essor. Il faut dire que la conjonction possible des canaux de diffusion (cinéma, TV, plateformes), offre une visibilité large dans la cible et longue dans le temps, ce qui le rend très attractif. « Les marques se mettent à fuir les espaces publicitaires classiques. Elles cherchent de plus en plus l’entertainement, le divertissement, se rendant compte qu’on touche davantage le consommateur dans l’émotion. » Si dans une pub la marque fait ce qu’elle veut, dans un film elle se plie à un cadre artistique qui ne lui appartient pas. Le réalisateur est l’arbitre. Jusqu’où veut-il aller par rapport à son projet ? C’est lui qui place le curseur. « On n’est pas là pour dénaturer une œuvre, insiste Jessica. Si on fait du placement de produit, c’est qu’on aime le cinéma. Le réalisateur entend les demandes. Les marques doivent entendre les contraintes. » Les placements s’entendent sur une base d’échange financier, sauf en ce qui concerne les vins, champagne et alcools : là, les marques répondent aux demandes de la mise en scène par un apport gratuit de produits, ce qui représente une économie directe pour la production.

Des univers très premium

La Maison Taittinger travaille en partenariat avec Marques & Films depuis une dizaine d’années. Son engagement à l’écran a évolué. « Le parti pris de départ était d’être présent dans de nombreux films français pour devenir le champagne référent au cinéma. Ça a très bien fonctionné, constate Jessica. Plus récemment, avec Vitalie Taittinger, nous avons recadré la stratégie pour aller sur des univers très premium, forts, élégants, de plus en plus internationaux, avec des réalisateurs et des castings qui vont donner une image distinctive, sans pour autant s’interdire des écarts. » Des bouteilles de Brut Réserve ou de Comtes de Champagne Taittinger se sont ainsi subtilement glissées dans des séries comme Citadel, Irma Vep, Winter Palace, Succession, The Pod Generation, La Maison… Au cinéma, la marque vient de danser avec Callas et Onassis dans le biopic Maria que porte Angelina Jolie et d’accompagner dans leurs fantaisies Virginie Efira et Romain Duris dans En attendant Bojangles, Bientôt on la verra à l’image dans Sacrifice de Romain Gavras avec Anya Taylor-Joy, Chris Evans et Salma Hayek, Bazaar de Remi Bezançon avec Laetitia Casta, Gilles Lellouche, Guillaume Gallienne, Venus Electrificata que signe Pierre Salvadori, ou encore la série The Deal attendue sur Arte. Thriller, tragédie, comédie, production historique ou fantastique : peu importe le genre, pourvu qu’il y ait des instants somptueux ou joyeux à célébrer avec naturel.

Taittinger dans The Pod Generation (2023)
www.marquesetfilms.com

Texte : Catherine Rivière
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