La présidente Allemagne du Prix international ArsNova de Cuisine d’Auteur est une cheffe reconnue. Amoureuse de la France, Douce Steiner défend au sein du restaurant familial « Hirschen » une cuisine aussi raffinée qu’exigeante. 

De la France, elle a hérité d’un prénom – Douce. Elle y a aussi ses racines familiales, une mère française : Claude. C’est par ailleurs en France, dans l’établissement triplement étoilé de Georges Blanc à Vonnas, qu’elle perfectionne son apprentissage, loin du restaurant familial. Car Douce Steiner est fille du chef Hans-Paul Steiner. En 1980, c’est lui qui fait l’acquisition de Hirschen dans le paisible village de Sulzburg, en Forêt-Noire. Le restaurant obtient une étoile Michelin après une année d’exercice puis deux en 1995. En 2010, deux ans après le retrait de son père, Hirschen perd son deuxième macaron. Douce Steiner le récupèrera en 2012, devenant ainsi la seule cheffe allemande doublement étoilée.

Avec son mari, Ido Weiler, et désormais sa fille, Justine, elle y défend une cuisine française « classique mais légère », dit-elle, « sans beurre, sinon pour le goût, ni crème, mais très aromatique, avec beaucoup d’herbes ». À cela, elle ajoute une touche japonaise, une cuisine qu’elle aime pour sa finesse. Elle ne souhaite pas étendre outre mesure cette affaire de famille. C’est une question d’équilibre. « Huit chambres, une trentaine de couverts, c’est bien assez pour assurer un service de qualité, avec toujours la même attention, et le bien-être de toute une équipe », assure celle qui est la présidente Allemagne du Prix ArsNova (anciennement Prix Taittinger). Présent dans neuf pays, ce prix renommé invite chaque année à la créativité autour d’un produit phare, valorisé lors des présélections nationales puis d’une finale internationale – la prochaine ayant lieu le 3 février 2026.

Que peut attendre une cheffe réputée des candidats qu’elle y rencontre ? « D’abord, le goût ! C’est pour moi le plus important dans un plat », répond-elle sans détour. « Le style, c’est autre chose. Cela prend du temps, il s’affirme avec le travail et l’expérience. Il naît de la créativité de chacun, c’est une recherche de longue haleine ». Elle-même estime que son style s’est affirmé doucement, avec patience. D’ailleurs, ce n’est que depuis deux ans qu’elle propose à sa carte ces plats que l’on qualifie de « signatures », ceux qui incarnent véritablement l’identité d’un chef. Pour elle, c’est une langoustine royale, poivre de Kampot sur pamplemousse rose ; et le filet de bison poché et foie gras d’oie sous une feuille de céleri, sur une essence de queue de bœuf et thé au citron, baies d’épine-vinette et huile d’olive.

Douce Steiner a été élue « cuisinière de l’année » par le Gault & Millau Allemagne, en 2023. En famille, donc, elle défend une cuisine de tradition, allégée et moderne, en s’inspirant « des vieux chefs français – Blanc, Loiseau et bien d’autres – qui avaient, pour chacun d’eux, un style inimitable ». C’est bien ce qu’elle regrette aujourd’hui, notamment en Allemagne : une cuisine standardisée qui répond plus aux modes et aux tendances qu’à l’inspiration. « Un peu partout dans le monde, on retrouve une cuisine universelle, sans originalité ni caractère. C’est à l’opposé de ma vision. La créativité, c’est un feeling, cela doit venir du cœur ».

www.douce-steiner.de

Texte : Cyrille Jouanno
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